W.A.Mozart: Requiem KV 626
Concert de la Toussaint
Kulturissimo (Tageblatt) du 14 décembre 2006 (par Ariel et Guy WAGNER)
Un Requiem pas comme les autres
Au fil des années, le "Allerséilenconcert" de Gerry Welter et de la Chorale St.-Michel a gagné sa place parmi les événements musicaux sur lesquels on peut compter au Luxembourg pour une prestation de qualité. L'édition 2006 n'a fait que le confirmer.
La Symphonie N° 39 … servait plutôt à ,,chauffer" les instruments historiques qu'à communiquer du nouveau. Par contre, si pour l'année Mozart le choix du Requiem s'imposait, un musicien comme Gerry Welter, avec sa curiosité intellectuelle et sa volonté d'explorer les sentiers non battus de la musique, n'alÂlait pas se contenter de la version traditiÂonnelle.
On connaît l'histoire du Requiem inÂcomplet, les démarches désespérées de Constanze Mozart pour faire achever ce gagne‑pain et les efforts de Eybler, Freystädtler et Süssmayr pour y réussir. C'est ce dernier qui le finit, mais depuis un certain temps, des musicologues sont de plus en plus en désaccord avec le résultat obtenu.
La version révisée de Robert D. Levin est celle qui va le plus loin, car Levin a fait un travail de fond, rendant l'orchestÂration de Süssmayr plus transparente et innovant au niveau du contenu par l'ajoute de deux fugues: sur l'Osanna du Benedictus et sur l'Amen qui conclut le Lacrimosa; celle‑ci a été réalisée sur la base d'esquisses retrouvées dans les années 60.
Le résultat est déroutant. On retrouve une oeuvre amincie et musclée, dépouilÂlée de sentimentalité, une musique forte en énergie et en émotion.
La conception qu'a Gerry Welter du Requiem est au diapason de cette versiÂon et nous saisit dès les premières notes: On a réalisé immédiatement avec quel savoir‑faire, quel art, il a su transmettre sa vision aux excellents musiciens dont il s'était entouré.
Les quatre solistes, l'admirable et comÂbien émouvante Gerlinde Sämann, soÂprano, Monique Simon, alto, Robert Sellier, ténor, et Jean‑Paul Majerus, basÂse, étaient très bien assortis et s'acÂquittèrent avec brio de leur tâche ardue, même si la voix basse nous a semblé par moments un peu tendue. Par contre, l'alto de Monique Simon gagne en intenÂsité à chaque audition.
L'orchestre,,La Banda", déjà impliqué en 1995 dans La Création et en 2000 dans La Grande Messe et ut mineur K427 de Mozart, emploie des instruÂments et des techniques d'époque. L'auÂthenticité n'était cependant pas une fin en soi: la lecture faite du texte chercha à exprimer le sens profond
de la musique. Aussi, y a‑t‑il eu quelque chose de touchant, d'humain, dans le son parfois un peu rugueux des vieux instruments: l'un ou l'autre couac dans les cuivres mettant en exergue finalement l'exploit que constitue la maîtrise de ces trompetÂtes et autres cors naturels.
Sous les mains du chef, les choeurs ‑ la Chorale St.‑Michel et l'Ensemble Vocal Cantica (directeur Jean‑Paul Majerus) ‑ ont formé un instrument à la fois précis et souple: Les voix étaient bien équiÂlibrées, aux timbres riches, pures dans les aigus, puissantes dans les graves. Elles ont pu faire ressortir intensément la profondeur spirituelle et émotionnelÂle de cette version du Requiem qui restera longtemps gravée dans nos méÂmoires.
Toutefois, pour conclure, nous devons ajouter à nos vives félicitations à tous les participants une question à la secrétaire d'Etat de la Culture: Pourquoi avez‑vous refusé de subventionner cet événement, obligeant les organisateurs à se démener comme de pauvres diables pour trouver les fonds indispensables?
Vous n'auriez quand même pas quelque chose contre Mozart?