La "Missa Omnium Sanctorum" de Jan Dismas Zelenka ( LW du 20 mars 2012)
Gerry Welter dirige la chorale Saint-Michel et l’orchestre « La Banda »
La première suite de danses orchestrales de Jean-Sébastien Bach a servi de prélude à l'imposante «Missa Omnium Sanctorum» de Jan Dismas Zelenka, dimanche, lors du traditionnel concert de printemps organisé par la chorale Saint-Michel, en l'église du même nom.Un public chaleureux et fidèle s'était donné rendez-vous pour applaudir les chanteurs de la chorale, les instrumentistes de l'orchestre «La Banda» ainsi que les solistes, la soprano Véronique Nosbaum, le contre-ténor Terry Wey, le ténor Daniel Johannsen et la basse Peter Harvey, sous la direction de Gerry Welter.
Les musiciens de l'ensemble «La Banda», qui comprend outre les cordes et clavecin habituels deux hautbois et un basson, jouent sur des instruments qui imitent au mieux leurs confrères baroques. C'est ainsi que la sonorité douce et aérée des cordes, soutenue par le continuo du clavecin et rehaussée par le timbre plus pénétrant des vents, a permis aux instrumentistes d'insuffler un maximum d'élan aux articulations et aux phrasés, de créer des effets contrastés mais sans dureté au cours de l'enchaînement des nombreux mouvements de danse.
Gerry Welter a assuré une interprétation à la fois variée et légère de cette «Suite orchestrale en ut majeur», optant volontiers pour des tempi allants mais ménageant soigneusement l'espace sonore, afin de ne pas trop alourdir le discours musical.
Après une courte pause, la chorale et les chanteurs solistes se sont joints aux instrumentistes, secondés cette fois-ci par l'orgue, pour Zelenka. Si les danses ont démontré la maîtrise et l'habileté du compositeur allemand, qui sait jongler à l'infini avec les motifs et les contrepoints sans jamais détruire l'équilibre structurel de l'œuvre, la messe de son contemporain, originaire de Bohême, accuse quelques longueurs difficiles à manoeuvrer.
La richesse des sentiments
La richesse de sentiments que Zelenka souhaite communiquer s'exprime toutefois clairement dans cette messe, et souvent avec une passion contagieuse. Il se complaît à créer des effets dramatiques, que ce soit par de longs enchaînements harmoniques à l'envol expressif, ou alors grâce au développement de la technique de l'imitation fuguée, qui lui offre une intensité décuplée.
Sous la direction de Gerry Welter, l'ensemble orchestral a su seconder activement solistes et choeur dans la deuxième partie du programme, se révélant être un partenaire à la fois discret et efficace. Cette souplesse a permis à la chorale de faire valoir une riche palette de nuances et de se montrer très à l'aise tout au long de cette partition aux dimensions imposantes.
Pour ce qui est des parties solistes, si le coloris expressif et pur de Véronique Nosbaum s'est fondu un peu trop volontiers dans la masse sonore qui l'entourait, privant les auditeurs de certains détails d'interprétation, le timbre particulier du contre-ténor, Terry Wey, a eu moins de peine à s'imposer, en particulier dans les longues phrases. Le ténor Daniel Johannsen a déployé un large éventail d'ornements et d'effets historiques dès son «Christe eleison» initial, alors que Peter Harvey, une basse au vibrato généreux, a surtout brillé dans l'«Agnus Dei» final.
Conquis, le public s'est levé, applaudissant avec enthousiasme pour marquer sa gratitude pour cette nouvelle prestation de la chorale Saint-Michel.
(Isabelle Trüb)